Dans les tuyaux catalans de Neus Ballús
Le long métrage Sis dies corrents, présenté dans la compétition de la 43ème édition du Cinemed, se plonge dans le quotidien de plombiers, via leurs rencontres et anecdotes quotidiennes. Dans une petite entreprise, deux personnages doivent travailler ensemble. Valero, un catalan bourru et attaché aux traditions, doit collaborer avec Mohamed un immigré marocain en période d’essai.
Pour ce film, la réalisatrice Neus Ballús s’inspire d’un univers qu’elle connaît bien. « Mon père est plombier. Il me racontait de nombreuses anecdotes. Le plombier rencontre des gens très différents et doit tenter de les comprendre », introduit la cinéaste. Pour ce faire, elle a passé du temps au syndicat des plombiers afin d’observer un millier de travailleurs. Dans ce casting sauvage en immersion, elle a repéré deux profils différents qu’il s’est révélé amusant d’associer. « Je voulais que chaque plombier incarne un univers différent », indique Neus Ballús. Elle a misé sur le naturel et la spontanéité des deux plombiers pour donner vie à son long métrage. « Comme je viens du documentaire, j’ai l’habitude de filmer des gens qui ne sont pas acteurs. Il faut passer du temps avec eux et les comprendre », précise Neus Ballús.
Mais la cinéaste ne propose pas un film réaliste classique avec une dramaturgie lorgnant sur le tragique. Elle préfère se plonger dans le quotidien des plombiers avec un rythme scandé par un nouveau jour de la semaine. « Ce dispositif du jour par semaine permet d’échapper au film narratif classique. On peut raconter une nouvelle anecdote chaque jour », confie Neus Ballús. La réalisatrice montre bien la diversité du métier de plombier, avec ses différents problèmes et ses diverses anecdotes. Elle insiste également sur les rencontres. Chaque jour, les deux travailleurs découvrent de nouveaux clients avec leurs personnalités et leurs milieux sociaux différents.
Mais son film aborde également de nombreuses thématiques de manière originale et décalée. Sans le ton pesant et sérieux du naturalisme. « Chacun de nous avons besoin d’humour et de légèreté dans notre vie quotidienne », rappelle Neus Ballús. Le choc des cultures entre les deux plombiers nourrit des ressorts comiques. Entre l’ouvrier qualifié et le jeune immigré, ce sont deux générations mais aussi deux cultures qui se confrontent. « Je n’aime pas parler d’intégration. Qui s’intègre à quoi ? Je préfère parler de rencontre », précise Neus Ballús. Les amis de Mohamed semblent davantage résignés. Ils se moquent de Valero et même de leur ami qui tente de travailler. « J’essaie de montrer que les préjugés peuvent venir des deux côtés, de la culture qui accueille comme de la culture qui arrive », nuance Neus Ballús.
Même si l’aspect de la précarité de la jeunesse immigrée n’est pas abordé de manière frontale. La semaine d’essai pour Mohamed peut également apparaître décisive et ne lui permet pas de trop contredire Valero. Neus Ballús, à travers le quotidien des deux plombiers, évoque particulièrement bien la diversité qui traverse la société espagnole.