Danse continuum au MUCEM
L’écrin sombre et tout en design de l’exposition On Danse ? étonne. C’est là même le principal argument de l’événement, dont le langage chorégraphique est à décrypter, pour les danseurs comme les néophytes.
S’il y a du mouvement dans la scénographie, en alcôves, courbes et balancelles, le mouvement apparaît unilatéralement dans la projection, sur divers écrans, de 59 métrages montrant de la danse. Le tout dure 6h, prend des airs de marathon cinématographique, empruntant peut-être à l’épuisement vu dans On achève bien les chevaux.
Pour Amélie Couillaud, commissaire adjointe de l’exposition, le projet a été pensé autour d’un espace ouvert, prompt au visionnage : « On a combiné des oeuvres filmiques qui ont différents statuts, qui montrent toutes la dimension physique du son, de la voix, des pas. Ce parti pris, d’une seule oeuvre à la fois, via plusieurs écrans, joue sur le rapport corps-espace-temps, qui sont les composantes de la danse. C’est comme ça que le film s’est imposé. »
De ce choix qui laisse à la fois le visiteur captif de cette invasion visuelle, et parfois libre de s’enfuir dans les transats à disposition, On Danse ? reste une hypothèse, puisque le visionnage laisse le spectateur entre contemplation et saturation d’images.
Tout droit sortis des collections du MUCEM, les chaussures pailletées et l’éventail de Minstinguett évoquent, quand à eux, le divertissement, alors que William Forsythe assure la représentation contemporaine avec un plumeau démontrant l’impossibilité de rester immobile et une oeuvre cachée.
Intrigué, on écoute Amélie Couillaud dévider le fil de cette narration : « Le point d’interrogation du titre fait écho à une volonté de laisser le spectateur rester là où il veut. Il n’y a aucune obligation. Il peut s’asseoir et rester une heure au même endroit. On voulait surtout affirmer la puissance de danser et ce qu’elle peut créer comme lien. » C’est vrai, parfois. On reste plus de 6 minutes béat devant The Jump 2 d’Hétain Patel ou Entre Temps-Temps de Julien Gallée-Ferrée. Les scènes de danse tirées de longs métrages apparaissent plus anecdotiques.
Dans l’obscurité dévouée à la multiplicité des écrans, la liberté est totale. Cette communion silencieuse, où chacun regarde dans la même direction, reprend la partition classique entre scène et public, que bien des chorégraphes contemporains, à l’instar de Boris Charmatz (assurant des rendez-vous au MUCEM pendant l’exposition) tentent de faire voler en éclats. C’est peut-être dans cette impossibilité que l’exposition revêt son plus grand intérêt.
On danse ?
Exposition du 23 janvier au 20 mai 2019